Cheval de Guerre de Steven Spielberg
Drame historique, guerre, USA, 2011, 2H27
Avec Jeremy Irvine, Emily Watson, Niels Arestup
Sortie le 22 février 2012
L'objectif : De la magnifique campagne anglaise aux contrées d’une Europe plongée en pleine Première Guerre Mondiale, "Cheval de guerre" raconte l’amitié exceptionnelle qui unit un jeune homme, Albert, et le cheval qu’il a dressé, Joey. Séparés aux premières heures du conflit, l’histoire suit l’extraordinaire périple du cheval alors que de son côté Albert va tout faire pour le retrouver. Joey, animal hors du commun, va changer la vie de tous ceux dont il croisera la route : soldats de la cavalerie britannique, combattants allemands, et même un fermier français et sa petite-fille…
Le subjectif : En amoureux transi de Steven Spielberg, quand j'ai commencé à lire ou entendre, ici ou là, que ce Cheval de Guerre était son meilleur film, j'ai voulu en avoir le cœur net. Même si, après un film de ce type, "avoir le cœur net" tient tout bonnement de la mission impossible. J'imagine que vous n'avez pas plus besoin de Tom Cruise que d'explications pour comprendre ce dont je veux parler. Du talent de ce réalisateur à nous faire palpiter les ventricules. Pourtant, après un Tintin en demi-teinte, épique et magnifique mais qui sonnait un peu trop creux, et avant son "biografilm" sur Abraham Lincoln (les biopics politiques me font toujours peur), Cheval de Guerre était une sorte de test pour moi. J'attendais que Spielberg me dise : oui, c'est bien moi le plus grand moviemaker, le seul capable de te faire rire, chialer, trembler et rêver le long d'une même pellicule.
Ce genre de sentiments qui m'ont traversé en découvrant E.T., Jurassic Park ou, plus récemment, Minority Report. Ce genre de sensations qui te font aimer le cinéma non pas pour des mouvements de caméra, des choix scénaristiques, des directions d'acteur ou des mises en scène particulières, mais pour un assemblage de tout ça. Et de bien plus encore. D'ailleurs, en regardant la bande-annonce, j'ai su très vite vers quoi je m'aventurais. Et c'est le bon terme : aventure. Une histoire d'hommes et de bêtes, bousculée par une encore plus grande histoire, avec une majuscule celle-là. Steven Spielberg, entre l'adaptation d'une BD franco-belge et la réalisation d'un film politique, retourne à un film humain. Et ce, même si Cheval de Guerre raconte le périple vu et vécu par le cheval, tour à tour nommé Joey, François ou Fritz (hommages à François Truffaut et Fritz Lang ?) par les différents protagonistes dont il changera la vie.
Spielberg filme donc la vie de cet animal hors du commun et qui, pourtant, comme le titre du long-métrage le laisse entendre, est là pour rendre hommage aux huit millions de chevaux morts pendant la Première Guerre mondiale. Avant l'industrialisation totale des moyens de combat, ces bêtes étaient là pour aller au front (scène de la charge, où des mitraillettes tirent sur les soldats, brillamment rendue par Spielberg, qui choisit délibérément de "montrer uniquement les chevaux sauter par-dessus ces armes sans leurs cavaliers sur le dos, sans montrer les hommes tomber"*), transporter les blessés ou tirer l'artillerie lourde. C'est donc un pan de l'Histoire auquel rend grâce le réalisateur américain, très attiré par les conflits mondiaux, lui qui se décrit comme "un enfant de la Seconde Guerre mondiale."*
Une histoire au cœur de l'Histoire, l'ordinaire au service de l'extraordinaire
Cet aspect historique a d'ailleurs son importance, puisque Spielberg n'épargne rien ni personne. Soldats Anglais comme Allemands, tous ont des "bons" et des "mauvais" côtés à mettre en scène. Le réalisateur filme aussi bien l'exécution de déserteurs comme les actes de bravoure. On aura même droit à une scène de complicité surprenante entre deux soldats d'armées adverses, le temps de libérer le pauvre cheval de son piège de barbelés. Un passage en échos à la célèbre trêve de Noël, qui avait mis entre parenthèse le conflit meurtrier pour quelques jours de décembre 1914. Et, même si on pourra être surpris par la quasi absence de l'armée française, l'ensemble rend compte de l'ampleur des combats. Outre ce moment attendrissant et humaniste, le spectateur aura droit à la cruauté, aux pillages, mais aussi à la détresse des combattants (pour la plupart inexpérimentés et voués à une mort certaine), Cheval de Guerre survolant tous les aspects de ce grand conflit mondial, en suivant son fil rouge. Ou plutôt son fanion rouge, celui-là même qui reste accroché au mors de Joey tout au long de l'histoire.
C'est ainsi qu'on croise successivement, en même temps que de nouveaux terrains de combat et de désolation, des soldats anglais, allemands et des civils français. Ce qui nous permet d'ailleurs de (re)découvrir de brillants seconds rôles comme les Britanniques Tom Hiddleston (le Loki de Thor et des Avengers) et Toby Kebell (épatant dans Dead Man's Shoes ou Rock'n'Rolla), l'Allemand David Kross (découvert dans The Reader) ou le Français que l'on ne présente plus, Niels Arestrup. D'autant plus dommage que tous ces acteurs s'expriment en... anglais. Tous. Ce qui donne lieu à des accents poussés horribles pour les oreilles, et à un des plus grands défauts du film. Avec la composition surjouée de Peter Mullan, père tourmenté du jeune héros (pas le cheval, l'autre) et l'interprétation irritante de la jeune Céline Buckens (petite-fille d'Arestrup). Pour autant, le casting s'avère presque parfait, avec une nouvelle découverte dans le rôle-titre, Jeremy Irvine. Après Empire du Soleil, où il avait lancé dans le grand bain Christian Bale (excusez du peu), Spielberg semble vouloir remettre ça. On souhaite au gamin de 22 ans la même réussite que son aîné...
Pour faire danser tout ce beau monde, et comme (presque) à chaque fois depuis Sugarland Express, Steven Spielberg s'est entouré du meilleur compositeur de musiques de film : John Williams. L'auteur des thèmes de Star Wars, Jurassic Park ou Superman accorde ses violons et livre encore une fois une partition à la fois épique et émouvante. Une musique qui rend juste magnifique LA scène du film, qu'on aperçoit dans la bande-annonce ci-dessus, où le cheval gambade de tranchée en tranchée, sous le feu ennemi. Une scène, à l'image du film tout entier, qui scotche le spectateur, un sourire idiot au milieu du visage et des étoiles pleins les yeux. Une scène à la beauté et à la dureté universelles et intemporelles, qui imposera à n'en point douter ce Cheval de Guerre comme l'un des plus grands Spielberg. Un de plus, serais-je tenter d'ajouter.
* : les citations sont extraites de l'interview de Steven Spielberg réalisée par Aurélien Allin (Cinema Teaser de février 2012)
Je veux bien le voir ce film :) Et je peux envoyer le texto aussi ^^ Contente que tu recommences à écrire.
RépondreSupprimerhaha merci ;)
RépondreSupprimeret du coup tu me diras comment c'était ! (je parle du film hein...)