samedi 10 mars 2012

| Avis ¦ Tucker & Dale vs. Evil, une comédie bien saignante


Tucker & Dale vs. Evil d'Eli Craig


Comédie horrifique, USA-Canada, 2010, 1H28
Avec Tyler Labine, Alan Tudyk, Katrina Bowden
Sortie le 1er février 2012



L'objectif :Tucker et Dale sont deux gentils péquenauds venus se ressourcer en forêt. Ils y rencontrent des étudiants venus faire la fête. Suite à un quiproquo entraînant la mort d’un des jeunes, ces derniers pensent que Tucker et Dale sont des serial killers qui veulent leur peau, alors que nos héros pensent que les jeunes font partie d’une secte et qu’ils sont là pour un suicide collectif ! C’est le début d’un gigantesque malentendu dans lequel horreur et hilarité vont se mélanger.



Le subjectif : Il faut bien l'avouer, se poiler devant un film d'horreur ne nous était pas arrivé depuis... Depuis ? Certains répondront sans hésiter Shaun of the Dead, d'autres, la bouche en cul-de-poule, ressortiront de leurs placards les « classiques » de Sam Raimi ou Peter Jackson. Pour ma part, je constate une seule chose : peu de réalisateurs se risquent à créer des survivals ou slashers qui bousculent nos zygomatiques aussi bien que nos tripes. (Les deux n'étant pourtant pas si opposés). Et, pour la grande majorité, il s'agit de petits génies tout sauf Américains.


Outre le Shaun de l'anglais Edgar Wright, on a dernièrement eu droit à Severance du britannique Christopher Smith, Dead Snow du Norvégien Tomy Wirkola, Undead des frérots australiens Spierig ou encore à Black Sheep, du néo-zélandais Jonathan King. D'accord, les résultats sont mitigés. Mais avouez que du côté des Amériques, les essais sont encore moins concluant. Depuis les sagas des Tremors ou des Evil Dead, donc, peu ou pas grand chose à se mettre sous la dent. Pour tout film d'horreur, on était ces derniers temps obligé de se coltiner des remakes de remakes, des renaissances d'exorcistes, des longs-métrages-tournés-en-vue-subjectives, des films de zombies ou des suites à n'en plus finir. Il était grand temps qu'un Amerloque vienne foutre un grand coup de godasse dans toute cette répugnante bienséance. Et, une fois n'est pas coutume, le crime est signé d'un Canadien.

Bon, d'accord, Eli Craig est tout sauf le dernier des bucherons québécois. Il est né en Californie, vingt ans avant Point Break. Mais le film qui nous intéresse ici (j'y viens, j'y viens), Tucker & Dale VS Evil, lui, est Canadien. Il a en tout cas été tourné à Calgary. Bref, cassez pas mon coup... Et pour en revenir à Elijah (ouais, c'est son vrai blaze), qui signe ici son premier film en tant que réalisateur, sachez qu'il est le rejeton de Sally Field. (…) Non ? Personne ? Une célèbre actrice, double oscarisée dans les années 1980, et qui sera la Tante May du prochain Spider-Man. Autant dire que le petit Eli savait dans quoi il s'aventurait...

Hommages à la pelle

Bon, autant dire tout de suite que le jeune scénariste et réalisateur (frère de Peter Craig, qui n'est pas la fusion de Peter Berg et Daniel Craig) n'a pas conquis les Oscars avec son film. Mais il a obtenu l'estime de nombreux cinéphiles, en manque de gore foutraque. Ce pari réussi, Tucker & Dale le doit en partie à un duo de premiers rôles délirant. Respectivement, Alan Tudyk et Tyler Labine. On se rappelle de l'interprétation "au poil" du premier dans l'hilarant Joyeuses Funérailles, mais on oublie qu'il était aussi et surtout le robot-titre du film I, Robot d'Alex Proyas. Oui, c'est lui, Sonny, qui donne la réplique à Will Smith. De son côté, Tyler Labine s'est fait (encore) plus discret, avec récemment un petit rôle dans Rise of the Planet of the Apes dans lequel il joue l'assistant flippé de James Franco. Bref, deux acteurs tout sauf habitués aux feux de la rampe. Mais, bizarrement, ce tandem fonctionne à merveille, avec une complicité digne des meilleurs Simon Pegg / Nick Frost, et un niveau d'arriérisme qui n'a d'égal que la cruauté et la discrimination dont ils sont les malheureuses victimes...



Car ce film part d'un terrible malentendu, qui rend ces deux "ploucs" aussi effrayants, pour la bande d'universitaires friqués qui vient se détendre la nouille à la campagne, qu'un Jason Voorhees (Vendredi 13) ou un  Leatherface (Massacre à la Tronçonneuse). Et ces références n'ont finalement rien d'anodin, tant ce Tucker & Dale s'évertue à rendre des hommages appuyés à ces mythes du cinéma horrifique. Dans son style, avec un humour très décalé, mais le résultat est autant effrayant pour les protagonistes qu'il est drôle pour le spectateur. Voir un jeune bellâtre croire qu'il est coursé par un fou faisant tournoyer autour de lui une tronçonneuse, alors qu'en réalité ce dernier, Tucker, ne tente désespérément que de faire fuir les innombrables abeilles qui s'attaquent à lui... vaut le détour ! Et les morts s'enchainent, aussi stupides que trash. Et nos yeux ébahis en redemandent. Aucun cliché n'est épargné : de la blonde à forte poitrine qui se fait asperger de sang et qui hurle à s'en faire péter les tympans à la légende d'antécédents morbides qui ont eu lieu il y a des années de ça dans la même forêt, en passant par un shérif inutile ou un passage dans une scierie...



D'autant qu'à côté de ça, l'histoire tient la route. Peu à peu, un semblant d'explication se dessine même sur le "pourquoi" de tout cet acharnement. Si le réalisateur semblait nous faire comprendre que tous ces films de genre et toutes les histoires d'horreur racontées au coin du feu pouvait conduire à un tel malentendu, une autre résolution pointe le bout de son nez. C'est un choix. Le film retrouve alors du sérieux, si on peut dire, et le délire prend (un petit peu) fin. Bizarrement, ces explications font basculer la comédie horrifique dans un slasher plus basique teinté d'humour noir. Le résultat n'est pas désolant pour autant, tant les deux (ou trois) acteurs principaux s'en sortent à merveille. Jusqu'au bout, d'ailleurs, en témoigne un final digne de celui de Shaun of the Dead. Quitte à suivre ses modèles, autant le faire jusqu'au bout de la pellicule...

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