Imitation Game de Morten Tyldum
Drame, biopic, USA-UK, 2014, 1H54
Avec Benedict Cumberbatch, Keira Knightley, Matthew Goode
Sortie le 28 janvier 2015
L'objectif : 1940 : Alan Turing, mathématicien, cryptologue, est chargé par le gouvernement Britannique de percer le secret de la célèbre machine de cryptage allemande Enigma, réputée inviolable...
Le subjectif : Ce qui est incroyable avec le grand livre de l'Histoire, c'est qu'il regorge de secrets, d'anecdotes, d'innombrables "petites histoires" qui le rendent non seulement fascinant, mais qui lui confèrent un caractère inépuisable pour quiconque aime se plonger dans ses délicieuses pages. Certes, l'histoire qui nous intéresse ici, celle d'Alan Turing, n'était plus tenue secrète depuis plusieurs années. Cependant, il aura fallu qu'un Premier Ministre britannique (Gordon Brown) présente des excuses posthumes en 2009 au nom de son pays sur les tortures infligées à ce concitoyen, pour que la légende qui l'entoure ne trouve une oreille attentive auprès d'un producteur de cinéma. Vous me direz : le 7e art ne fait pas tout dans la vie. Vous auriez raison. Cependant ici, je parle de cinéma, donc, si vous le permettez (note à moi-même : arrêter d'être schizophrène), je poursuis. Cette année, grâce à ce Premier Ministre et à une biographie publiée par Andrew Hodges en 1983, l'histoire édifiante de Turing peut s'exposer en pleine lumière. Celle de nos salles obscures.
Cette histoire, quelle est-elle ? Celle d'un homme qui, grâce à des aptitudes de mathématicien et de cryptographe hors normes, et à l'invention d'une machine, a changé le cours de la Seconde Guerre mondiale. Nous sommes en 1939, à Londres, et la Grande-Bretagne s'apprête à y entrer. Alors que le pays s'organise, un Anglais de 27 ans, campé par l'extraordinaire Benedict Cumberbatch (nommé aux Oscars), se rend à un entretien d'embauche bien particulier. Il propose ses services d'amateur de casse-têtes à l'armée britannique, qui cherche à déchiffrer les messages codés par les Nazis et leur machine Enigma, et donc à gagner la guerre. "Agnostique en ce qui concerne la violence", Alan Turing se présente comme le seul capable de résoudre le problème que représente Enigma, le plus difficile qui soit. Prétentieux ou en tout cas sûr de son fait, Alan Turing pénètre ainsi dans le centre secret de Bletchley Park, où Imitation Game a été en partie tourné, non sans s'être fait quelques "ennemis".
Le film de Morten Tyldum nous montre d'ailleurs que cette capacité à faire naître de l'antipathie à son égard ne date pas du début de la guerre. Plus jeune, Alan paraissait déjà "anormal" pour ses camarades de classe. Imitation Game dépeint la vie d'un homme malmené, harcelé par ses semblables, des enfants et des adultes qui se sont arrêtés à la différence que leur renvoyait ce frêle adolescent aux préoccupations étranges, ou cet adulte à l'arrogance aussi infinie que l'était son génie. Pourtant, d'excès d'étrangeté ou d'arrogance, Alan Turing ne souffrait pas. Son seul "tort" était, de son propre aveu, son incapacité d'échanger avec ceux qui l'entouraient. Il lui était impossible de simplement comprendre ce qu'ils voulaient dire, impossible de déceler premier ou second degré, de différencier le faux du vrai. Les rapports sociaux étaient alors compliqués, et souvent voués à l'échec, exception faite de quelques uns, comme de la belle histoire d'amour vécue avec Joan Clarke, interprétée par la brillante Keira Knightley.
Individu formidablement "à part", Alan Turing n'a eu de cesse d'être perçu comme "différent" toute sa vie. Que ce soit écolier, au cœur du dispositif de décryptage en pleine guerre, ou une dizaine d'années plus tard, alors qu'il se retrouve confronté à une affaire de mœurs puis inculpé, le génie qu'il est est non seulement incompris, mais également opprimé. D'une époque à l'autre (ces allers-retours, trop nombreux, sont pour moi le gros point noir du long-métrage), le réalisateur norvégien nous montre l'acharnement d'une société seulement capable de voir en lui un camarade bizarre, un collègue arrogant ou un homosexuel hors-la-loi. Car si Imitation Game parle de la Seconde Guerre mondiale et du rôle à la fois secret et primordial qu'ont joué Alan Turing et ses camarades cryptographes, ainsi que de la naissance de machines qui finiront par devenir nos ordinateurs, le film de Morten Tyldum rappelle également l'acharnement subi par des dizaines de milliers d'homosexuels jusqu'à la fin des années 1960. S'il n'aura pas la même portée que la grâce de la reine Elizabeth II survenue fin 2013 et qui annulait une condamnation pour "indécence manifeste et perversion sexuelle" survenue plus de soixante ans plus tôt, gageons que ce film aura le mérite de remettre un peu d'ordre dans les livres d'histoire, et de rendre à Alan Turing tout le mérite et le respect qui lui sont dus. Un moindre mal, pour cet homme d'exception.
Cette histoire, quelle est-elle ? Celle d'un homme qui, grâce à des aptitudes de mathématicien et de cryptographe hors normes, et à l'invention d'une machine, a changé le cours de la Seconde Guerre mondiale. Nous sommes en 1939, à Londres, et la Grande-Bretagne s'apprête à y entrer. Alors que le pays s'organise, un Anglais de 27 ans, campé par l'extraordinaire Benedict Cumberbatch (nommé aux Oscars), se rend à un entretien d'embauche bien particulier. Il propose ses services d'amateur de casse-têtes à l'armée britannique, qui cherche à déchiffrer les messages codés par les Nazis et leur machine Enigma, et donc à gagner la guerre. "Agnostique en ce qui concerne la violence", Alan Turing se présente comme le seul capable de résoudre le problème que représente Enigma, le plus difficile qui soit. Prétentieux ou en tout cas sûr de son fait, Alan Turing pénètre ainsi dans le centre secret de Bletchley Park, où Imitation Game a été en partie tourné, non sans s'être fait quelques "ennemis".
"Parfois, c'est la personne à laquelle on ne s'attend pas, qui fait des choses que personne ne pourrait jamais imaginer." Joan Clarke (Keira Knightley)
Le film de Morten Tyldum nous montre d'ailleurs que cette capacité à faire naître de l'antipathie à son égard ne date pas du début de la guerre. Plus jeune, Alan paraissait déjà "anormal" pour ses camarades de classe. Imitation Game dépeint la vie d'un homme malmené, harcelé par ses semblables, des enfants et des adultes qui se sont arrêtés à la différence que leur renvoyait ce frêle adolescent aux préoccupations étranges, ou cet adulte à l'arrogance aussi infinie que l'était son génie. Pourtant, d'excès d'étrangeté ou d'arrogance, Alan Turing ne souffrait pas. Son seul "tort" était, de son propre aveu, son incapacité d'échanger avec ceux qui l'entouraient. Il lui était impossible de simplement comprendre ce qu'ils voulaient dire, impossible de déceler premier ou second degré, de différencier le faux du vrai. Les rapports sociaux étaient alors compliqués, et souvent voués à l'échec, exception faite de quelques uns, comme de la belle histoire d'amour vécue avec Joan Clarke, interprétée par la brillante Keira Knightley.
Individu formidablement "à part", Alan Turing n'a eu de cesse d'être perçu comme "différent" toute sa vie. Que ce soit écolier, au cœur du dispositif de décryptage en pleine guerre, ou une dizaine d'années plus tard, alors qu'il se retrouve confronté à une affaire de mœurs puis inculpé, le génie qu'il est est non seulement incompris, mais également opprimé. D'une époque à l'autre (ces allers-retours, trop nombreux, sont pour moi le gros point noir du long-métrage), le réalisateur norvégien nous montre l'acharnement d'une société seulement capable de voir en lui un camarade bizarre, un collègue arrogant ou un homosexuel hors-la-loi. Car si Imitation Game parle de la Seconde Guerre mondiale et du rôle à la fois secret et primordial qu'ont joué Alan Turing et ses camarades cryptographes, ainsi que de la naissance de machines qui finiront par devenir nos ordinateurs, le film de Morten Tyldum rappelle également l'acharnement subi par des dizaines de milliers d'homosexuels jusqu'à la fin des années 1960. S'il n'aura pas la même portée que la grâce de la reine Elizabeth II survenue fin 2013 et qui annulait une condamnation pour "indécence manifeste et perversion sexuelle" survenue plus de soixante ans plus tôt, gageons que ce film aura le mérite de remettre un peu d'ordre dans les livres d'histoire, et de rendre à Alan Turing tout le mérite et le respect qui lui sont dus. Un moindre mal, pour cet homme d'exception.
"Est-ce que j'étais Dieu ? Non, car Dieu n'a pas gagné la guerre. Nous, si." Alan Turing (Benedict Cumberbatch)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire