dimanche 4 septembre 2016

| Avis ¦ Nerve, la mort en ligne

Nerve d'Ariel Schulman et Henry Joost

 

Thriller, USA, 2016, 1H37
Avec Emma Roberts, Dave Franco, Emily Meade
Sortie le 24 août 2016



L'objectif : En participant à Nerve, un jeu qui diffuse en direct sur Internet des défis filmés, Vee et Ian décident de s’associer pour relever des challenges de plus en plus risqués et gagner toujours plus d’argent. Mais bientôt les deux « Joueurs » s’aperçoivent que leurs moindres mouvements sont manipulés par une communauté anonyme de « Voyeurs ». Le jeu vire au cauchemar. Impossible d’arrêter…



Le subjectif : J'ai lu beaucoup de (bonnes) choses sur Nerve avant de me faufiler dans la salle obscure. D'abord, que c'était une version 2.0 du chef d’œuvre de David Fincher The Game, une version plus connectée au monde d'aujourd'hui mais qui conservait cette frontière si infime qu'elle en était anxiogène entre jeu et réalité. Comme le héros campé par Michael Douglas dans le film de 1997, celle de Nerve était prise au piège d'un jeu empiétant dangereusement sur son quotidien. J'ai aussi lu que c'était une critique des méfaits d'Internet, de l'absence de pudeur et de limite des réseaux sociaux, ou plus directement un questionnement sur les dangers de voir sa vie privée dévoilée et v(i)olée en ligne, tout en proposant un "divertissement pour ados à la Hunger Games et cie". Amateur de thriller à grand spectacle, pas forcément réfractaire aux bonnes productions "pour ado" (les deux Labyrinthe, notamment), et très intéressé par le sujet - notamment après avoir vu le docu interactif #DoNotTrack sur Arte - je n'ai pas hésité longtemps. D'autant que la bande-annonce donnait très envie, que les premiers retours étaient plutôt bons, et que les deux jeunes réalisateurs, auteurs du documentaire Catfish sur les affres d'un amour virtuel, étaient dignes de confiance.




Autant le dire directement, je n'ai pas été déçu. Bien au contraire. Le divertissement est à la hauteur des promesses "vendues" par le trailer. Après une (très) rapide présentation des personnages principaux (Venus et ses amis Syd et Tom, pour commencer) et du fameux Nerve, l'action se lance sans attendre. D'abord réfractaire, Venus, incarnée par l'actrice-chanteuse de 25 ans Emma Roberts, qu'on a notamment vu dans la série American Horror Story, va accepter l'invitation du mystérieux jeu en ligne. D'un simple clic, la voilà "joueuse". Le but est simple : elle doit attendre les défis proposés par ses nombreux "voyeurs", et les relever dans un temps imparti pour espérer gagner de l'argent. Le tout en se filmant en direct, à l'instar d'autres voyeurs libres de retransmettre ses prouesses. Plus les défis s'enchaînent, plus ils rapportent des dollars à son compte en banque, et des voyeurs à son compte Nerve. Au final, le but est non seulement de ne jamais s'arrêter, abandonner ou rater un défi, mais aussi d'atteindre le défi ultime, celui qui oppose les deux derniers joueurs encore en lice à la fin de la nuit. Course contre la montre, enchaînement de missions de plus en plus périlleuses, appât du gain et du frisson : la (grande) première partie de Nerve s'avère pleine d'adrénaline et d'émotions.

Divertissement intelligent

Au contact de Ian, interprété par Dave Franco, qui faisait partie de son premier défi, notre jeune héroïne se métamorphose. Elle change totalement d'attitude, quitte ses habits (au sens propre comme figuré) de petite fille discrète et de voyeuse. Elle prend les choses en mains (cette main qui accélère la moto d'Ian), faisant fi du danger. Si ce revirement peut paraître abrupt et trop soudain, il symbolise à mon sens parfaitement les risques que veut pointer du doigt le film. Sur Nerve on se met à nu - volontairement ou contre son gré, à cause de tous ces smartphones braqués sur soi - et cela engendre souvent des répercussions qui nous dépassent. Un peu comme sur Internet, comme ces photos qu'on publie innocemment, ces mots qu'on laisse s'échapper, qu'on tape sur notre téléphone sans penser une seconde qu'ils déclencheront un tsunami de violence virtuelle. Ce jeu, comme beaucoup de moyens de communication que nous utilisons maintenant tous les jours, nous vole un peu de notre identité, de notre intimité. Même si cette critique se perd au fil du long-métrage, la faute à des "twists" scénaristiques trop faciles et à un dénouement globalement plus sensationnel et moins vraisemblable, elle a le mérite d'exister. Sous couvert d'un thriller spectaculaire, d'action et de tension très bien orchestrées, Nerve met en garde la génération 2.0 - je ne sais plus s'il faut parler de Y ou de Z - sur les infinies possibilités des moyens qu'elle utilise, et, fatalement, sur leur propension à détruire des vies privées. Et des vies, tout court.

Pour appuyer leur propos, en plus de pouvoir compter sur un (jeune) casting impeccable (les deux héros, mais aussi les seconds rôles et la mère de Vee, jouée par Juliette Lewis), les réalisateurs assurent sur le plan visuel. Le générique de fin est un modèle du genre, qui reprend nombre d'applications et de logiciels que la plupart des gens reconnaîtront sans mal, tandis que le reste du film est sans cesse "visité" par des effets rappelant justement l'utilisation de ces outils : fenêtres de messagerie, écrans vidéo, pointeur GPS, etc. La caméra aime également se balader à l'intérieur des ordinateurs ou des smartphones, dont le pouvoir - positif comme négatif - n'a jamais été autant mis en avant que dans cette histoire. Très bien joué, visuellement bluffant, Nerve est aussi et surtout un régal pour les oreilles. La BO est réellement prodigieuse - je ne saurais que vous conseiller de vous rendre sur le champ sur la playlist dédiée sur YouTube - entre house, électro, dance, pop-rock et même hip-hop (nos jeunes héros étant fans du Wu-Tan Clan...), l'éclectisme et l'électrique règnent en maîtres. Bref, tout sonne au diapason pour faire de Nerve un grand film à ne surtout pas réserver qu'aux ados, tant il est divertissant et amusant, parfois même angoissant, et, au fond, plutôt intelligent.



Je vous quitte avec un des morceaux du film, Can't Get Enough de Basenji :


2 commentaires:

  1. Quelle belle surprise ! Nerve est un film qui vaut le détour ! Et pour cause, les scènes d’action sont réussies, le suspense est maintenu du début à la fin et le duo Emma Roberts et Dave Franco marche bien.

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    1. C'est effectivement un genre de film qui fait plaisir à voir, car - pour ma part - n'en ayant rien attendu, j'en suis sorti ravi, et surpris. Merci!

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