dimanche 7 novembre 2010

| Avis ¦ Kaboom : sexe, drogue, fin du monde et Araki rit



Kaboom de Gregg Araki


Comédie, USA, 2009, 1H26
Avec Thomas Dekker, Juno Temple, Haley Bennett
Sortie le 6 octobre 2010


L'objectif : Smith mène une vie tranquille sur le campus - il traîne avec sa meilleure amie, l’insolente Stella, couche avec la belle London, tout en désirant Thor, son sublime colocataire, un surfeur un peu simplet - jusqu’à une nuit terrifiante où tout va basculer. Sous l’effet de space cookies ingérés à une fête, Smith est persuadé d’avoir assisté à l’horrible meurtre de la Fille Rousse énigmatique qui hante ses rêves. En cherchant la vérité, il s’enfonce dans un mystère de plus en plus profond qui changera non seulement sa vie à jamais, mais aussi le sort de l’humanité.


Le subjectif : C'est bon, enfin, c'est arrivé. Gregg Araki est revenu à la vie. Après trois films bons (voire excellents : Splendor, Mysterious Skin et Smiley Face), qui dénotaient toutefois avec l'univers chaotique et délirant qu'il avait mis en place, voilà le réalisateur le moins hétéro-sexuel d'Hollywood de retour. Son dixième film, Kaboom, signe un revirement fracassant vers son style si spécial et old-school dans sa manière de représenter la jeunesse perdue et excessive. Un gros sketch d'1h20 qui ne laisse aucune place aux demi-mesures. Cinéma de l'excès, cinéma de la contre-culture pop et arty, cinéma du désastre, autant sexuel que planétaire : Kaboom vient faire exploser les carcans du 7e art comme une tête dans Scanners... Kaboom !!!

Et le moins que l'on puisse dire c'est que le changement est radical. Finie l'histoire d'amour à trois de Splendor (pourtant peu commune, avec une femme et deux gars), laissés de côté le drame terrible de Mysterious Skin (le film qui a lancé la carrière de Joseph Gordon-Levitt) ou la « space comédie cake » de Smiley Face (avec la sublime Anna Faris), Gregg Araki revient à ce qui avait fait sa force dans sa « Teenage Apocalypse Trilogy ». Un personnage principal (Smith) égaré entre hétéro et homo sexualité (rôle jusque-là réservé au brillant James Duval, mais dans Kaboom octroyé au jeune Thomas Dekker, aperçu dans Heroes), qui va être malgré lui confronté à un monde... et un scénario (il faut bien l'avouer) qui partent totalement en vrille.

Surabondance de sexe et de super-pouvoirs

Dans Kaboom, la trame suit plus ou moins l'enquête menée par Smith, qui cherche à découvrir ce qu'il est arrivé à une fille rousse, rencontrée une nuit de débauche. Drogue, fatigue et alcool sont-ils les raisons de cette vision ? Smith croit dur comme fer que la fille en question a été enlevée. Et il est d'autant plus obsédé par cette fille qu'il la voit dans le même rêve depuis de nombreuses nuits. Sur cette histoire somme toute « traditionnelle », la première patte de Gregg Araki vient se greffer : la surabondance de sexe. Smith, célibataire, va enchaîner les aventures avec plusieurs personnages secondaires, qui vont ensuite se montrer importants dans le déroulement de l'intrigue. Gregg Araki ne fait pas baiser au hasard, il sait où il va. Cependant, l'histoire reste plus confuse que celle de Nowhere, et moins trash que The Doom Generation. Smith, joué par Thomas Dekker, impressionne moins que James Duval, à l'époque. Ce dernier, acteur fétiche du réalisateur, apparaît néanmoins lui aussi dans ce dixième long-métrage : en tant que le Messie. Cheveux longs, air hagard, il représente un peu ce qu'il est advenu du cinéma d'Araki entre Nowhere et Kaboom. Il a pris de l'âge et du poids, il s'est ramolli mais ses idées, totalement cinglées, sont toujours présentes.



Les scènes s'enchaînent vite, et l'intrigue progresse elle aussi très (trop) rapidement. On a du mal à s'attacher aux personnages, tant ce qui leur arrive est surnaturel. Le côté SF n'est pas dérangeant (il était également bien présent dans Nowhere, avec des extra-terrestres venus détruire notre monde), mais il est mal ordonné. Des super-pouvoirs apparaissent sans que personne ne trouve cela étrange... Ces changements de cap peuvent mettre le spectateur mal à l'aise, celui qui ne sait pas à quoi s'attendre. Il a alors deux possibilités : soit accompagner Araki dans sa quête de filmer l'apocalypse, et en cela suivre les tribulations des personnages bien décidés (de gré ou de force) à profiter de leurs derniers instants. Soit rester insensible devant cet avalanche de couleurs, de bruits, d'images qui laissent parfois penser à un assemblage désordonné de (mauvaises) idées.

Du cul(te) à tous les étages

Quoiqu'il en soit, et si Kaboom n'est plus aussi violent ou revendicatif que pouvait l'être The Doom Generation (un véritable film sur la vie d'une génération perdue), il n'en demeure pas moins un excellent cru. Un retour aux sources qui se dévore pour ses scènes et ses répliques cultes. Il y a bien sûr les scènes de cul, nombreuses, mais aussi celles qui les précèdent. LA fameuse scène de masturbation (qui n'égale pas celle de Nowhere, mais qui est comique), celles où Smith fantasme sur son coloc, ou enfin celle où sa mère se fait masser. Dans ce dernier cas, on croirait tout simplement au début d'un film porno... Bref, l'apocalypse est bien là, et tous ces gamins s'envoient en l'air, s'éclatent et profitent du temps qui semble être compté.

Côté casting justement, plusieurs acteurs tirent leur épingle du jeu. Les deux copains de baise, Thomas Dekker et Juno Temple, assurent l'essentiel. Haley Bennett est plus intéressante, dans son rôle de confidente un brin hautaine mais surtout persécutée par une petite amie possessive et sorcière sur les bords... Cette dernière, jouée par la française Roxane Mesquida, marque elle aussi les esprits, tout comme le Messie, interprété par James Duval. Les autres rôles masculins font peine à voir, surtout sélectionnés pour leur musculature plutôt que pour leur sens de la répartie. Mais c'est aussi cela le cinéma de Gregg Araki : une importance de l'image, des corps, et de l'hédonisme presque total. Qu'on aime ou pas le côté foutraque du scénario, on ne peut qu'adorer la beauté et le soin que prend ce réalisateur à filmer les ressentis d'une jeunesse quelque peu perdue. Ajouter à cela une bande son toujours impeccable, et son retour au cinéma déjanté est bel et bien consommé. Vivement la suite.

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