Möbius d’Éric Rochant
Espionnage, thriller, France, 2012, 1H43
Avec Jean Dujardin, Cécile de France, Tim Roth
Sortie le 27 février 2013
L'objectif : Grégory Lioubov (Jean Dujardin), un officier des services secrets russes est envoyé à
Monaco afin de surveiller les agissements d’un puissant homme
d’affaires. Dans le cadre de cette mission, son équipe recrute Alice (Cécile de France),
une surdouée de la finance. Soupçonnant sa trahison, Grégory va rompre
la règle d’or et entrer en contact avec Alice, son agent infiltré. Naît
entre eux une passion impossible qui va inexorablement précipiter leur
chute.
Le subjectif : A l'avant-première
toulousaine de Möbius, Jean Dujardin avait tenu à avertir les spectateurs en
conseillant de ne pas tenter de s'accrocher à l'intrigue, mais de se
laisser porter. L'acteur français préconisait au public de se
laisser entraîner par l'histoire d'Alice et Moïse – incarnés par
Cécile de France et lui-même – plutôt que d'essayer de
comprendre tous les rouages du scénario d'Eric Rochant. Et, au vu du
résultat, difficile de ne pas lui donner raison. Car, d'un film
français prometteur mêlant espionnage et histoire d'amour, Möbius,
à trop vouloir jouer sur les deux tableaux, s'égare entre deux
eaux. Forcé de choisir, le spectateur se raccroche néanmoins à ce
qu'il peut : c'est-à-dire, pour beaucoup, à une belle romance entre
deux acteurs au sommet de leur art.
Le casting est
effectivement « au poil », que ce soit le néo-Oscarisé
Jean Dujardin, qui campe un espion russe plutôt convaincant (jusqu'à
ses répliques qu'il prononce évidemment dans la langue de Tolstoï)
et à l'apparence du héros perdu qu'il incarnait dans Le Bruit
des Glaçons ; ou Cécile de France, parfaite dans son rôle
d'agent infiltrée : tour à tour mutine et naïve. L'autre grand
acteur de l'affiche, Tim Roth, tire lui aussi son épingle du jeu, en
jouant un personnage « mafieux » à la fois sévère, et
séduit par la belle Alice. Le casting est également « à
poil », lors de nombreuses scènes d'amour entre la jeune femme
et l'espion. Des séquences très intenses et sensuelles, où la
caméra pellicule du réalisateur fait des merveilles, révélant une
atmosphère envoutante.
Grain de beauté
C'est ce qui fait
indéniablement le charme du film d 'Eric Rochant, réalisateur
en 1994 des Patriotes (qui
traitait déjà de l'univers des espions). Le grain de la
pellicule (le metteur en scène la préférant aux appareils
numériques) révèle une chaleur presque vivante. Möbius
entraîne alors le spectateur dans une histoire torride entre deux
êtres. Deux âmes aux multiples facettes, qui se poursuivent, se
cherchent et se découvrent de la plus crue des façons. Le temps de
ces quelques séquences faites de peau, de sueur et de gémissements
(mais pas seulement), on oublie le reste de l'intrigue, pour mieux se
délecter de la simple présence des acteurs, et de leur
interprétation.
Malheureusement, la trop
grande complexité du scénario - qui mêle sans sourciller monde de
la finance, crise économique et cercles mafieux – finit par noyer
ces bonnes impressions. Même si cette romance est belle à observer,
le contexte trop difficile à appréhender plombe l'émotion primaire
qui fait qu'on aime – ou qu'on n'aime pas – un film. Une distance
entre le spectateur et le film se met alors en place, l'éloignant de
toute prise de plaisir. Möbius devient un bon film
d'espionnage – pour qui parvient à démêler tous les fils de
l'intrigue – mais il perd toute sa dimension envoutante. Une grande
déception, en tout cas à la hauteur des espérances que le film
avait su susciter...
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