mardi 20 avril 2010

| Avis ¦ Sans laisser de traces, la chance du débutant


Sans laisser de traces de Grégoire Vigneron


Thriller, France, Belgique, 2009, 1H35
Avec Benoît Magimel, François-Xavier Demaison, Julie Gayet
Sortie le 10 mars 2010


L'objectif : A bientôt quarante ans, Étienne, sur le point de prendre la présidence de son groupe, veut soulager sa conscience d'une injustice qu'il a commise au début de sa carrière et qui, précisément, l'a lancée. Convaincu par un ami de jeunesse, il se rend chez l'homme qu'il a lésé à l'époque pour le dédommager. Mais les choses tournent mal et l'homme est tué par son ami. Étienne tente alors de reprendre le cours de sa vie, mais celle-ci vire peu à peu au cauchemar. Harcelé par son ami, rattrapé par l'enquête de police, plus Étienne se débat, et plus l'étau se resserre. Au bout du rouleau, Étienne réalise qu'il ne lui reste plus qu'une seule solution...


Le subjectif : Scénariste de comédies comme Prête-moi ta main ou Le petit Nicolas, Grégoire Vigneron s'essaie avec Sans laisser de traces au polar. Mais comme le révélait Benoît Magimel, acteur principal du film, les mécanismes du polar et de la comédie ne sont pas si éloignés. Qui plus est, les situations comiques peuvent très bien s'incorporer au polar – et c'est le cas ici. Toujours est-il que s'aventurer dans un domaine qui n'est pas le sien, pour un premier pas dans la réalisation, il fallait oser. Le pari, si risqué fut-il, est pourtant réussi. Grégoire Vigneron trouve avec Sans laisser de traces un ton juste, une ambiance inquiétante et un suspens qui ne s'éteint jamais. Le jeu des acteurs n'y est vraiment, vraiment pas étranger.


Comme souvent depuis La vie est un long fleuve tranquille, et en passant par Nid de guêpes ou L'ennemi intime, Benoît Magimel rend une copie très propre. Il incarne le rôle de quelqu'un qui est sur le point de pouvoir tout gagner, et qui a surtout la peur de tout perdre. Arrivé au sommet à cause d'un mensonge, il va accumuler les maladresses durant tout le film, se compliquant la tâche et risquant à chaque fois de retomber tout en bas. Mentir, mentir, mentir : dès que son personnage a commencé, plus rien ne va l'arrêter. Magimel joue pourtant très bien, et on perçoit dans ses attitudes ce que ces mensonges lui coûtent. Au final, cet enchaînement de problèmes révèle le talent de Grégoire Vigneron et de son passé de scénariste comique. Cette loi de Murphy, c'est un mécanisme courant dans les comédies. Et si ici le réalisateur ne cherche pas à faire rire, le procédé est sensiblement le même.



Face à Magimel, les bonnes prestations ne manquent pas. François-Xavier Demaison est tout simplement exceptionnel dans le rôle de l'ami d'enfance qui ressurgit dans la vie du héros. L'impression qu'il laisse au spectateur se situe entre l'humour, la folie et la peur. Il évolue lui aussi, comme le personnage joué par Benoît Magimel, face à la situation qu'ils ont déclenché tous les deux. Beaucoup moins précautionneux, et surtout plus sanguin face à ce qui lui arrive, le personnage interprété par Demaison apporte au film la dose de stress nécessaire. Julie Gayet, en femme fidèle mais jalouse, convainc également et forme avec son compagnon un couple très réaliste. Les seconds rôles sont également convaincants, comme la fille de l'homme que tue accidentellement le personnage joué par Demaison, ou encore l'inspecteur de police joué par Stéphane de Groodt (habitué aux séries TV). Paris, autre personnage du long-métrage, est magnifiquement filmée. Comme d'ailleurs l'ensemble de ce premier film, qui ne souffre d'aucune faute de mauvais goût visuel ou musical. Sur ce dernier point, la musique manque un peu de présence à certains moments, mais garantit bien l'aspect inquiétant du polar.

Finalement, Sans laisser de traces est une belle surprise : un premier film plein de promesses et surtout une confirmation pour des acteurs dans la fleur de l'âge, et sur qui il faudra compter. Le long-métrage débute par ce constat : « les trois éléments clés de la réussite sont le talent, le travail et la chance. » Jouant là dessus, le scénariste développe un film intelligent et réflexif sur ce dont un homme est capable pour réussir. Une belle leçon de morale, pas forcément à sens unique, et qui laisse au spectateur la possibilité de se faire sa propre idée. Car ces trois éléments se complètent sans arrêt, il faut savoir user des trois pour obtenir un résultat durable. Et, fatalement, il faut savoir parfois laisser son sort à la chance. D'où la dernière interrogation du protagoniste principal : « suis-je prêt à accepter d'avoir de la chance ? » Tout un programme...

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