mardi 16 mars 2010

| Avis ¦ Fantastic Mr Fox, le renard et la manière


Fantastic Mr Fox de Wes Anderson


Animation image par image, USA, 2007, 1H28
Avec les voix originales de George Clooney, Meryl Streep, Jason Schwartzman
Sortie le 17 février 2010

L'objectif : Mr Fox est le plus rusé des voleurs de poules. Une fois marié, son épouse Felicity lui demande de mettre fin à ses activités incompatibles avec la vie d’un honorable père de famille. La mort dans l’âme, il se fait alors engager comme éditorialiste dans un journal local où il s’ennuie terriblement. Quand son fils Ash a 12 ans, Mr Fox part s’installer en famille à la campagne à proximité d’élevages de volailles détenus par trois ignobles fermiers : le gros Boggis, Bunce le petit et Bean le maigre. La tentation est trop forte : Mr Fox reprend ses anciennes activités et s’attire les foudres des trois fermiers. Il doit appeler à la rescousse tous les animaux de la région pour protéger sa famille et son territoire.


Le subjectif : A la fin d'un toast, après avoir rectifié un discours, le héros fantastique demande à ses amis attablés : « comment c'était » ? Assis dans notre fauteuil, pris aux tripes par la merveille d'animation à laquelle nous venons d'assister, nous ne pouvons nous empêcher de répondre, à ce personnage aux poils roux comme au réalisateur Wes Anderson : « Fantastique, maître renard ! »


Vrai de vrai, quelle (ré)création ! Jusque là jamais passé à la réalisation de film d'animation image par image, Wes Anderson nous régale dans ce Fantastic Mr Fox. Tiré du célèbre livre de conte pour enfants écrit par Roald Dahl (Charlie et la Chocolaterie, James et la grosse pèche, etc.), le film était nommé aux derniers Oscars dans les catégorie meilleur film d'animation et meilleure musique. Malheureusement pour l'équipe, Là-haut y était aussi et a raflé les deux statuettes. Face à l'expérience de Disney, l'inexpérience du papa de la Famille Tenenbaum n'a pas pesé bien lourd. Mais outre cette cérémonie, il reste un film – et un film merveilleux.

Un message d'optimisme

Comme le conte, le film de Wes Anderson délivre un message d'optimisme, toujours gai et rarement fataliste. Pas toujours très moral (le vol, c'est bien), le héros Maître Renard va chercher à se prouver qu'il est le meilleur afin de se sentir exister. N'aimant pas sa vie rangée, il va continuer ses méfaits, négligeant les promesses faites à sa tendre épouse. Il va continuer à n'être que ce qui, au fond, le caractérise : un renard voleur de poules. Sur ce point-là, le film délivre sans mal cette idée : « chassez la nature, elle revient au galop. » Fantastic Mr Fox est alors un formidable récit sur la condition d'animal, et notamment sur la notion de clan. Même décrié, raillé, le héros n'en reste pas moins une figure emblématique pour les différents protagonistes (plus ou moins inventés par Wes Anderson par rapport aux personnages originaux). Le thème principal du film reste la famille, et tous les petits conflits qu'elle génère. Un thème évidemment familier à qui connait un tant soit peu l'œuvre d'Anderson. Le rapport entre le père et le fils y est notamment fondamental.

D'un point de vue purement esthétique, ce film d'animation ne ressemble à aucun autre. Étant de la famille de l'image par image, il est bien évidemment loin de la pureté des derniers Disney. Mais ce côté « fait maison » est plus qu'un atout, c'est LE point fort du film. Il rappelle les belles heures du studio anglais Aardman, qui avait avec Wallace et Gromit séduit de nombreux fans. Comme Nick Park avec la pâte à modeler, Wes Anderson réalise un film saccadé, imparfait mais bourré de charme. Dans leurs mimiques, les personnages ne peuvent pas être réalistes (seuls les yeux et quelques poils de moustaches vont bouger par moment), mais ils ressemblent bien au « lunatisme » des protagonistes des habituels films de Wes Anderson. Mieux, on retrouve chez eux le look, l'attitude et les réactions des personnages de la belle collection du réalisateur texan.



Maître Renard, c'est d'ailleurs un peu Wes Anderson. Même minceur, même costume en velours marron : la veuve de Roald Dahl aurait même laissé entendre que l'auteur de La Vie Aquatique était le réalisateur idéal pour ce projet, car il s'habillait comme le personnage. Et puis, le livre Fantastique Maître Renard est le premier qu'ait possédé Wes Anderson, très tôt inspiré par ce style humoristique direct et très grinçant. De là à réaliser un film d'animation, il y a un très grand pas qu'il devait franchir avec l'aide d'Henry Selick – le papa de l'Etrange Noël de Monsieur Jack. Mais Selick était occupé à tourner son Coraline, et ce fut un mal pour un bien : le résultat est tout simplement bluffant. Certainement entouré d'une brillante équipe, Wes Anderson a égalé les plus grands, et imposé sa patte sur le film d'animation.

Un enchantement également sonore

Concernant l'équipe, la troupe d'acteurs qui doublent les personnages est forcément déterminante. A voir en VO (à moins de subir les voix de Mathieu Amalric et Isabelle Huppert... mais également de s'émerveiller devant celle d'Alexis Tomassian), ce film est un enchantement sonore. George Clooney est magistral dans son interprétation, toujours collant parfaitement au renard fier et courageux, mais toujours roublard. Ses compères - Meryl Streep, Bill Murray, Jason Schwartzman, Willem Dafoe, Adrien Brody, Michael Gambon ou Owen Wilson – sont eux aussi brillants. Wes Anderson a même poussé le perfectionnisme jusqu'à donner à ses personnages de poils et de plastique les traits reconnaissables de leurs maîtres chanteurs. Le blaireau pataud, c'est Bill Murray ; la renarde gracieuse, c'est Meryl Streep ; le prof de sport excité, c'est Owen Wilson, etc. Le tout recèle une fraicheur et une identité propre aux créations de Wes Anderson, quitte à se répéter. Mais l'ensemble reste vraiment, vraiment un plaisir pour les yeux. Et donc, pour les oreilles.

Les oreilles qui sont véritablement gâtées. Nommé aux Oscars dans la catégorie Meilleure musique, Fantastic Mr Fox ne l'a pas été pour rien. A la baguette de chef d'orchestre, Wes Anderson a placé un génie, qui a en plus la qualité d'être français : Alexandre Desplat. Auteur des Bandes originales de grands films, comme The Queen, Benjamin Button ou Un Prophète, ce compositeur parisien donne au long-métrage une âme, tout simplement. Aidé de nombreux morceaux savoureux et très début de siècle (notamment grâce à la chanson de Davy Crockett des Wellingtons, ou aux interprétations de Burl Ives et Nancy Adams), la BO colle bien à son époque : intemporelle. Car le classique y trouve aussi une place, tout comme les Rolling Stones et les Beach Boys, dont les deux titres (« Heroes and Villains » et « Ol' Man River ») enveloppent de douceur la partition de Desplat, qui lui donne à sa musique comme Anderson à son film : une touche très agréable de produit bio.

3 commentaires:

  1. Mais euuuh t'as pas dit qui jouait Jason Schartzman ! C'est mal de me faire ça !
    Bon sinon ça m'a donné envie de le voir, je vais tenter de le trouver à Nice.
    Pour ce qui est de la BO, c'était à prévoir, Wes Anderson est réputé pour ses choix de qualités. J'ai celle de La famille Tenenbaum, c'est un vrai bonheur !

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  2. Hi hi désolé... il joue le rôle du fiston un peu foufou, mais surtout "bon à rien", pour son père...
    Oui oui trouve-le, c'est un des meilleurs films de l'année, vraiment ! Et si tu aimes Anderson et Schwartzman, tu devrais adorer ce film !!! ^^
    Ouais Desplat est un génie, à tel point que j'ai acheté la BO... et le bouquin de Roald Dahl aussi. Je suis faaaaan!

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  3. J'ai revu le film défiler devant mes yeux. Il y a dans ta critique ce rythme si particulier qu'a le film. Je n'ai rien d'autre à redire, tu as même souligné la présence de la fantastique B(i)O.
    Un véritable chef d'œuvre de l'animation, qui me semble-t-il n'a pas rencontré son public ?

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