jeudi 17 mai 2012

| Avis ¦ Moonrise Kingdom, comédie romantique et poétique



Moonrise Kingdom de Wes Anderson


Comédie dramatique, USA, 2012, 1H34
Avec Bruce Willis, Edward Norton, Bill Murray
Sortie le 16 mai 2012
(Compétition officielle - Cannes 2012)

L'objectif : Sur une île au large de la Nouvelle-Angleterre, au cœur de l’été 1965, Suzy et Sam, douze ans, tombent amoureux, concluent un pacte secret et s’enfuient ensemble. Alors que chacun se mobilise pour les retrouver, une violente tempête s’approche des côtes et va bouleverser davantage encore la vie de la communauté.



Le subjectif : Comme le fait justement remarquer son personnage principal, Sam, interprété par le jeune Jared Gilman, "la poésie ce n'est pas que des rimes, c'est de la créativité". C'est un peu, beaucoup, à la folie, passionnément comme cela que pourrait se définir l’œuvre de Wes Anderson. Au travers de ce Moonrise Kingdom, qui fait l'ouverture du 65e Festival de Cannes, mais aussi de ses précédents longs-métrages, comme le plus connu La Famille Tenenbaum ou le magnifique Fantastic Mr Fox. De la poésie inventive, de la créativité douce, dure et drôle à la fois : une sorte de 3D artisanale et familiale qui donne lieu à chaque fois à des résultats étonnants, émouvants, mais jamais ennuyeux.


Encore une fois, ce Wes Anderson-là ne déroge pas à la règle. L'esthétisme est de rigueur (en voyant ses plans d'intro et d'outro, on se dit que le réalisateur quadragénaire est un artiste-peintre sur pellicule), tendant peut-être parfois jusqu'à trop de rigidité. L'histoire est belle, jolie, humaine. Comme souvent, le récit est familial ; non pas qu'il s'adresse à toute la famille, mais il parle d'elle. Qu'elles soient juives, décomposées ou canidées, aquatiques ou à vapeur, les familles forment le cinéma de Wes Anderson. Ici aussi, avec cette romance entre deux adolescents laissés à l'abandon : le premier orphelin, élevé entre famille d'accueil et camp de scouts ; la seconde qui voudrait le devenir, étouffée entre ses parents et ses trois petits frères.



Cette romance d'aventure, qui naît et se développe sous les yeux du spectateur, Moonrise Kingdom l'édulcore de drôlerie absurde, de situations cocasses, d'instants épiques - sans que jamais, vraiment, le public ne sache ni pourquoi il sourit, ni pourquoi il s'émeut. Cette magie tient au fait que l'auteur laisse de côté tout cynisme, ironie ou second degré. L'humour et l'émotion sont brutes, abruptes par moments, et dotées d'une sensibilité et d'un lyrisme poétiques, encore une fois. En regardant un film de Wes Anderson, on se laisse emporter par sa musicalité, par sa candeur, par son euphorie aussi, parfois. C'est un peu comme lire un conte d'autrefois : qu'on sait rude et rêche, mais au final aussi beau que la vie.

Partition sans fausse note

Et comment parler de cette partition sans fausse note (mais qui, il faut le comprendre, ne pourra pas plaire à tout le monde) sans énoncer tous ceux qui font partie de ce bel orchestre ? Outre la bande de joyeux jeunes acteurs - les scouts et la promise de Sam : Suzy, étonnante Kara Hayward - on retrouve deux inconditionnels, Bill Murray (le père de Suzy) et Jason Schwartzman (le scout et cousin Ben), et de nouveaux musiciens : Edward Norton (génial chef scout), Bruce Willis (le flic de l'île, amené ici aussi à sauver le "monde") ou Frances McDormand (la maman de Suzy). Mais s'il est un acteur qu'il ne faut pas oublier, quand bien même son nom ne serait pas très facile à distinguer parmi les nombreuses lignes du générique, c'est le compositeur Alexandre Desplat. Le Français, en collaboration avec Conrad Pope, donne à Moonrise Kingdom, comme il l'avait fait avec Fantastic Mr Fox, ce supplément d'âme indispensable. Cette symphonie qui fait de cette comédie romantique adolescente une pièce majeure. Et poétique.

La Toxitation : "I'll be outback. I'm gonna find a tree to chop down." * de M. Bishop (Bill Murray), visiblement touché par la fugue de sa fille Suzy, à ses trois fils.

 

* La VF : "Je reviens. Je vais me trouver un arbre à abattre."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...